Les entreprises technologiques n’évoluent plus isolément. Elles se développent en réseaux d’interdépendance, articulant plateformes, infrastructures, modèles d’IA, données et orchestration. Pourtant, trop souvent encore, les salons reproduisent un modèle hérité, centré sur la présentation de solutions individuelles, comme si l’on pouvait encore choisir un fournisseur de cybersécurité, de cloud ou d’IA indépendamment du reste de la chaîne de valeur. C’est à partir de ce décalage que nous avons choisi de nous intéresser à l’évolution du format même des salons IT.
Ready For IT, un format sélectif
Contrairement aux salons traditionnels ouverts à tous, Ready For IT adopte un format sélectif one to one. Les visiteurs ne s’y inscrivent pas librement : ils sont invités et présélectionnés par l’équipe organisatrice sur la base de leur fonction, de leurs projets et de leur capacité à engager des échanges constructifs avec les fournisseurs présents. L’événement propose un programme de rendez-vous sur mesure, pensé pour maximiser les synergies. Cette approche, centrée sur la qualité plutôt que la quantité, reflète l’ADN du groupe Comexposium, organisateur du salon via sa filiale dédiée aux événements business haut de gamme.J’ai rencontré sa directrice, Maria Iacono, pour comprendre comment le groupe anticipe cette mutation : de la curation qualitative à la structuration d’espaces écosystémiques, en passant par l’intégration réfléchie de l’intelligence artificielle dans l’organisation elle-même. Car au-delà d’un événement, ce qui se joue ici, c’est la capacité de toute une industrie à se représenter fidèlement — et utilement — dans un monde technologique devenu systémique.
L’IA réorganise les chaînes de valeur
L’histoire de l’informatique d’entreprise est marquée par une succession de transformations qui ont profondément modifié la façon dont les technologies sont conçues, commercialisées et intégrées. Chaque transition – des réseaux locaux aux systèmes interconnectés, du logiciel sous licence au SaaS, en passant par le client/serveur, puis du SaaS au cloud hybride – a réorganisé les chaînes de valeur, redéfini les modèles économiques, et redessiné les équilibres entre éditeurs, intégrateurs et utilisateurs finaux.Dans ce contexte de recomposition accélérée, les salons IT ne peuvent plus se contenter de juxtaposer des offres individuelles ou des démonstrations de produits. L’émergence de l’IA, en particulier dans ses déclinaisons génératives et agissantes, impose une nouvelle
logique : celle de l’interconnexion. L’enjeu n’est plus simplement de présenter une solution autonome, mais de démontrer sa capacité à s’intégrer dans une chaîne de valeur globale
– avec des briques complémentaires en matière d’infrastructure, de données, de sécurité, d’orchestration ou encore de gouvernance.
Structurer l’espace autour de zones écosystémiques
Chez Comexposium, cette transformation est prise à bras-le-corps. « Nous sommes en alerte sur tout ce qu'il y a en termes de capacité de maximiser les possibilités de se rencontrer sur place et de rencontrer les meilleurs. Mais tout cela doit se faire avec un grand besoin de précaution parce que nous avons affaire à la donnée sensible », explique Maria Iacono. Il ne s’agit donc plus d’organiser des salons conventionnels dans lesquels l’exposant se contente de réserver un stand.Le modèle défendu repose sur une approche sélective, exigeante, centrée sur la rencontre qualifiée entre décideurs IT et fournisseurs technologiquement matures. « Nous ne sommes pas un salon au sens traditionnel. On ne peut pas juste acheter un stand. Il faut correspondre à une nomenclature et aux besoins réels des acheteurs », insiste-t-elle. La force du modèle Ready For IT tient dans sa capacité à orchestrer ces rendez-vous one to one en amont, sur la base de critères précis, avec l’objectif d’accélérer les projets concrets.
Mais cette logique du face-à-face trouve aujourd’hui ses limites. Dans l’ère de l’IA, les décideurs ne cherchent plus une solution unique, mais un environnement fonctionnel complet. « Si je fais un one to one avec Mistral, ils vont me proposer leur LLM, mais je n’ai pas l’infrastructure, je n’ai pas le stockage. Il me faut tout l’écosystème », résume Maria Iacono. Dès lors, Comexposium travaille à rapprocher physiquement, sur le salon, les entreprises partenaires qui constituent ensemble des chaînes de valeur cohérentes.
À moyen terme, l’ambition est de structurer l’espace autour de zones écosystémiques modulaires, où les visiteurs pourront appréhender les synergies technologiques plutôt que de naviguer d’un stand à l’autre sans lien logique.
La quantité ne vaut rien sans pertinence
Cette volonté de mise en cohérence repose sur une conviction forte : à l’heure où l’attention est une ressource rare, la quantité ne vaut rien sans pertinence. Contrairement à d’autres modèles événementiels, Comexposium assume une stratégie de curation rigoureuse. Pas de « foire à la tech » ni d’ouverture démesurée du catalogue : chaque fournisseur est sélectionné selon sa capacité à répondre à des besoins exprimés et identifiés. Les stands sont la dernière chose qu’on vend. On est sur le quali, quali, quali, pas le quanti », affirme Maria Iacono. Ce parti-pris qualitatif se traduit aussi par une sélection active des participants, côté visiteurs, pour garantir la qualité des échanges.Dans ce contexte, l’intelligence artificielle ne se limite pas à une thématique portée par les exposants : elle transforme également les outils et les méthodes d’organisation des événements. Chez Comexposium, l’IA est intégrée dans la chaîne de valeur opérationnelle, pour mieux anticiper les besoins logistiques, fluidifier les parcours et enrichir l’expérience des participants. « Nous voulons interroger nos propres assistants IA pour savoir combien de personnes sont bloquées à l’aéroport, combien de rendez-vous restent à programmer, quelles sont les opportunités à ne pas manquer », explique-t-elle.
L’IA agit comme un agent de convergence
Mais cette intégration technologique ne se fait pas à la légère. Le groupe pose desgarde-fous stricts : protection des données, souveraineté technologique, fiabilité des outils. Dans un univers où la cybersécurité est au cœur des préoccupations des participants, la confiance reste un socle non négociable.
Au-delà des formats, ce sont les frontières métier elles-mêmes qui s’effacent. L’IA agit comme un agent de convergence : les directions marketing, RH, client, finance, sécurité ne peuvent plus évoluer en silos. Les solutions sont désormais transversales, interopérables, construites sur des socles communs. Comexposium en tient compte dans la conception de ses événements, avec une volonté de briser les cloisonnements thématiques traditionnels pour refléter la réalité des usages et des systèmes.
Ready For IT 2025 s’inscrit pleinement dans cette dynamique. Il en est le prototype assumé. « Oui, Ready For IT 2025 est un salon de transition, à l’image du marché », conclut Maria Iacono. Une transition vers une nouvelle manière de penser l’événementiel
IT : non plus comme une vitrine de produits, mais comme une architecture vivante de relations, d’alliances et de trajectoires stratégiques. Chez Comexposium, cette mutation est déjà à l’œuvre.