60.000 pièces métalliques fabriquées par Boeing, 140.000 composants plastiques fabriqués par BMW… A ce niveau d’entreprise et ces volumes, la fabrication additive n’est plus l’affaire de quelques précurseurs qui s’amusent à imprimer en 3D des pièces uniques ou en quantités réduites.
Le centre de technologie additive de GE Aviation a la taille de 3 terrains de football (américain), est équipé de 90 imprimantes 3D par projection de poudre métallique, et occupe 300 ingénieurs et employés pour concevoir le design et fabriquer des objets industriels. Ainsi, 25.000 pièces ont été fabriquées en 3D pour les moteurs à réaction de Boeing, dont le réacteur LEAP.
Des exemples remarquables
L’exemple du réacteur LEAP est significatif de la tournure que prend le marché industriel de l’impression 3D. Ce réacteur est en effet équipé d’une buse de carburant particulièrement efficace, mais réputée impossible à fabriquer. L’usage d’un logiciel puis d’une imprimante 3D par application du métal en couche a pourtant rendu sa fabrication possible. A la satisfaction de Boeing, LEAP est le réacteur le plus vendu dans sa gamme, il a jusqu’à présent rapporté 200 milliards de dollars !
Autre exemple avec le géant allemand de l’automobile BMW. Aujourd’hui le groupe imprime en 3D plastiques plus de 140.000 composants. On y trouve les pièces de personnalisations sur certains véhicules, des pièces pour la nouvelles BMW i8 Roadster, les tableaux de bord personnalisés de la nouvelle Rolls Royce Phantom, et plus surprenant des pièces pour la BMW 507 d’origine de la fin des années 50 !
Un dernier exemple avec un turbopropulseur de GE Catalyst. Jusqu’à présent il combinait 855 pièces fabriquées dans le monde, ce qui nécessitait également 60.000 miles pour parvenir à l’atelier de montage. Aujourd’hui, grâce à l’impression 3D qui représente le quart de la machine, le nombre de pièces a été ramené à 12, pour la plupart fabriquées sur place. Mieux encore, l’impression 3D a permis de réduire le poids du moteur de 5 %, et de gagner 20 % en consommation de carburant.
Mind Meld et la transformation de la culture industrielle
Ces géants de l’industrie étaient réunis à l’invitation de GE pour participer au Mind Meld, un sommet très fermé sur la fabrication additive industrielle. L’occasion de découvrir les dernières avancées en matière d’impression 3D, de constater l’avancée de la maturité de l’industrie en ce domaine, et également de mesurer le degrés de transformation qui accompagne ces technologies et la pression sur les modèles économiques.
L’impression 3D permet désormais de fabriquer des pièces à l’unité, les prototypes par exemple, des pièces en petites quantités, et des pièces en grande quantité, se substituant aux procédés de fabrication traditionnels. C’est une nouvelle façon de concevoir et de fabriquer de choses, ainsi que de gérer la chaîne d’approvisionnement. Plus étonnamment, c’est une ouverture offerte à de nouveaux acteurs, sur des marchés jusqu’ici réservés aux gouvernements (militaire, aviation, espace, etc.) et aux grandes entreprises. Des entrepreneurs intelligents et des sociétés de capital risque commencent commencent à s’y intéresser.
Mais la fabrication additive est avant tout un marché. Selon AT Kearney, il représente moins de 1 % des pièces manufacturées dans le monde. Quant à sa valeur ‘pièces imprimées’, estimée aujourd’hui à 8,8 milliards de dollars, elle devrait atteindre 126 milliards en 2021. Ajoutons à cela le marché des équipements d’impression 3D – imprimantes, logiciels, documentation, services, à l’exclusion des matières – estimé à 13,3 milliards de dollars investis par les entreprises au cours des 4 dernières années, il devrait cumuler 280 milliards de dollars dans les 19 0 prochaines années.
Ne manquent plus que les compétences
Seul bémol dans ce concert de louanges, les experts invités au Mind Meld n’ont pu que constater l’absence de l’impression 3D dans les cursus de formation des ingénieurs. Avant de passer à l’impression, il faut d’abord concevoir le design des pièces sur des logiciels spécifiques. Mais cette mission relève-t-elle de l’informatique ou de l’industrie ?
Si la fabrication additive est enthousiasmante - elle permet de partir d’une page blanche pour créer souvent sans contrainte un objet que l’on voit fabriquer couche par couche - elle manque de compétences. Avec un surprenant constat : les jeunes générations nées avec le numérique pensent numérique, mais pas industrie ! L’impression 3D, pour se développer dans l’industrie, doit dépasser ses limites et séduire les concepteurs de demain. Ce qui va imposer une contrainte forte : consacrer une part des investissements évoqués précédemment à la formation.
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