La forte médiatisation et la multiplication des usages et des projets autour des registres distribués de la blockchain nous feraient presque oublier que celle-ci n’est pas universelle, et qu'elle présente des limites.

L’engouement pour la blockchain pourrait nous faire croire qu’elle est une solution à tous les problèmes… Malheureusement, si les cas d’usages se multiplient, la blockchain n’apporte pas une réponse à tout, et pour de nombreux projets il existe des solutions meilleures et plus efficaces.

En fait, nous vous proposons une autre vision de la blockchain pour comprendre que deux concepts s’opposent :

  • Celui classique du grand-livre centralisé, que l’on retrouve sur la majorité des bases de données. Son mode de fonctionnement est simple, vous posez une question, et la réponse est détenue dans une base unique. Par exemple : « à qui appartient cette parcelle de terrain ? ». La réponse est détenue dans la base du cadastre.
  • Celui de la blockchain repose sur des grands-livres décentralisés. C’est à dire que la réponse est détenue par plusieurs grands-livres identiques. Au lieu de vous adresser à une base unique, vous posez la question à une personne que vous croisez, comme « Qui est la Reine d’Angleterre ? », et la réponse est détenue par toutes les personnes qui se présentent.

La blockchain remplace le grand-livre centralisé par des grands-livres distribués, où tout le monde peut trouver la réponse puisque tout le monde a l’information. On peut bien évidemment imaginer que le grand-livre central est dupliqué et détenu par tous, et donc interroger n’importe quel sous-ensemble des registres distribués, puisque « tout le monde a la réponse » ! Mais est-ce bien raisonnable, voire faisable ?

En réalité, si les avantages de la blockchain sont évidents, dans le même temps certaines caractéristiques clés de cette technologie la desservent :

Le débit

Un référentiel basé sur la blockchain ne peut traiter que 10 transactions par seconde, ce qui en fait une base de données très lente. Beaucoup d'usages se contentent du bas débit, mais la technologie ne résistera pas aux applications à haut débit ! Certes, les infrastructures vont évoluer et gagner en puissance, ce qui pourra éventuellement faire sauter cette limitation, mais à quel prix ? Et est-ce réaliste ?

Le consensus

Pour qu'un journal de blockchain fonctionne, toutes les parties doivent accepter d'utiliser le même registre. C'est faisable quand il y a une organisation centrale qui peut forcer toutes les parties à l'utiliser. Mais, dans de nombreuses industries, le paysage concurrentiel est trop fragmenté pour arriver à un consensus sur la question de savoir qui doit gérer le grand-livre.

La décentralisation des communications

Un grand-livre centralisé nécessite une communication en continu. Blockchain peut au contraire fonctionner même quand il n'y a pas de canal de communication disponible. Cela semble être un avantage, jusqu'à ce que vous réalisiez que la plupart du monde a maintenant des communications de données continues. Dans cet environnement, blockchain perd l'un de ses principaux avantages, et la mise en œuvre d'un grand-livre centralisé sera presque toujours moins chère, plus rapide et plus fiable que l'implémentation d'un grand-livre distribué.

L’usage de la blockchain nécessite la réunion d’un ensemble de circonstances, sinon elle ne peut être la bonne solution. Et dans une approche professionnelle, le domaine doit dans la grande majorité des cas disposer d’une autorité centrale afin d’imposer aux parties l’usage des grands-livres distribués. C’est autrement plus facile à dire qu’à faire et à maintenir.

En fait, aujourd’hui la majorité des projets de blockchain reposent sur des pilotes blockchain développés. Comme ces pilotes sont peu nombreux, il n'y a finalement que peu de blockchain déployées en production… Alors, avant de vous précipiter et de suivre les médias, posez-vous la question est-ce que la blockchain est la meilleure solution pour votre projet ?

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