Au tour d'EMC d'apporter sa pierre au monde de la finance face aux entreprises : le géant du stockage de données va bien, ses comptes sont positifs et en progression, mais il veut satisfaire les marchés ! Alors il va réduire ses effectifs.... avant de les augmenter au clurs de l'année !

La semaine a été chargée en annonces de restructurations, de nominations et de licenciements… Et marquée par la rumeur d'un gigantesque plan de réduction d'effectifs d'IBM - Forbes évoque 118.000 (!) suppressions de postes – rapidement démenti par l'intéressé, qui devrait cependant procéder dans les prochaines jours au licenciement de plus de 10.000 personnes (lire « Rumeurs sur IBM, 120.000 ou 12.000 licenciements ? »).

Résultats dans le vert

Parmi les géants américains des IT, il en est un qui a toujours su se faire oublier et limiter les vagues, EMC. Il faut dire que le géant du stockage – sa part de marché est de 23,5 %, ses premiers compétiteurs, NetApp et IBM, n'affichent que 11,9 % et 11,7 % - a publié pour l'année 2014 une progression de son chiffre d'affaires de 5 %, à 24,4 milliards de dollars, là où la plupart de ses concurrents sont en repli. Pour le seul dernier trimestre 2014, le bénéfice net du groupe a progressé de 12 %, à 1,15 milliard de dollars, soit 56 cents par action.

VMware, le numéro un mondial de la virtualisation, dans lequel EMC possède une participation de 80 %, a participé à ce résultat, en enregistrant en particulier une progression de son chiffre d'affaires de 16 %. Même la filiale logicielle Pivotal, dont on peine à connaître la réalité des activités, a enregistré une progression de 27 %.

Mais restructuration dans l'air

Alors, dans ces conditions, pourquoi EMC a-t-il annoncé un nouvel effort de restructuration, accompagné de réductions d'effectifs, sans pour autant indiquer combien d'employés seront touchés ? Information confirmée par Katryn McGaughey, la porte-parole du groupe.

Démonstration du rôle de la finance dans la vie des grandes entreprises, les marchés financiers ont jugé insuffisantes les perspectives annoncées par EMC. Le consensus des analystes pour 2015 était de 26,21 milliards de dollars en chiffres d'affaires, pour un bénéfice net de 2,13 dollars. Le groupe a eu l'outrecuidance de réviser ses prévisions et de ramener ses perspectives financières à 26,1 milliards de dollars et un bénéfice par action de 1,98 dollar. Une révision qui prend sa source dans les fluctuations défavorables des cours de changes !

Les investisseurs veulent casser EMC

Quelle que soit son origine, réviser des perspectives est une faute impardonnable pour les investisseurs. Surtout qu'EMC est dans le collimateur du fonds Elliott Management, qui milite activement pour une restructuration du groupe. Ce qui se traduirait par la séparation de VMware, qui deviendrait une spin-off. L'objectif étant bien évidemment d'augmenter le portefeuille et les revenus des investisseurs par le jeu financier.

L'annonce du rachat par EMC, au cours de l'année, d'une partie de ses actions, pour 3 millards de dollars, ce qui va avoir pour effet mécanique d'enrichir les propriétaires des titres rachetés et de revaloriser les titres restants, n'a pas suffit à calmer le jeu. EMC va donc passer par la case licenciements, ce que les américains appellent (poétiquement ?) les pink slips, les 'feuillets roses'. L'objectif étant de donner un coup de pouce aux perspectives financières du groupe. Passé un coût de restructuration estimé à 130 à 150 millions de dollars.

Le paradoxe, licencier avant de recruter...

La vague de licenciements la plus importante devrait avoir lieu avant la fin de ce trimestre. Le reste suivra au cours de l'année. Probablement à cause des règles locales de procédures. Mais rien ne confirme que les effectifs hors du territoire US seront touchés.

Mais le pire dans cette histoire, c'est qu'EMC a indiqué que le groupe aura plus de salariés en fin qu'au début de l'année 2015 ! La progression de son activité justifie la progression de ses effectifs. Les affres du pouvoir qu'exercent les marchés financiers sur les entreprises sont parfois déroutants...