Alors que les questions écologiques préoccupent de plus en plus les Européens, le Cigref a récemment publié un billet qui remet sur le devant de la scène les enjeux environnementaux associés au numérique. L’impact grandissant du secteur sur la consommation d’énergie laisse entrevoir la nécessité de nouvelles approches, axées sur la sobriété.

En préambule, le Cigref rappelle un constat qui fâche : la part du numérique dans la consommation d’énergie, au lieu de diminuer, s’annonce grandissante. D’environ 3% en 2018, elle devrait atteindre 7% en 2025 si aucun effort n’est fait, progressant de 9% par an.

L’association de grandes entreprises a engagé depuis longtemps une réflexion sur ces enjeux. Dans ce contexte, le Cigref a récemment reçu Jean-Marc Jancovici, président de The Shift Project, et Hugues Ferreboeuf, directeur de projet chez The Shift Project, afin que ces derbiers présentent leur rapport « Lean ICT : Pour une sobriété numérique ».

Une surconsommation liée autant aux usages qu’à la production de matériel

Selon ce rapport, la consommation d'énergie directe pour un euro investi dans le numérique a augmenté de 37 % par rapport à 2010. Par ailleurs, la surconsommation liée au numérique est principalement le fait des pays développés.

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Un scénario pour stopper la dérive énergétique du secteur

Pour stopper cette inflation, The Shift Project propose un scénario de sobriété basé sur les recommandations suivantes :

  • Adopter la sobriété numérique comme principe d’action, en interrogant l’utilité sociale et économique des comportements associés au numérique, et en les adaptant en conséquence.
  • Accélérer la prise de conscience des impacts environnementaux du numérique à tous les niveaux de la société et des organisations, publiques comme privées.
  • Intégrer les impacts environnementaux comme critères de décision dans les politiques d’achat et d’utilisation des équipements numériques.
  • Permettre aux organisations de piloter leur transition numérique en disposant de références et d’outils leur permettant de prendre en compte l’impact environnemental de la composante numérique des choix qu’elles envisagent.
  • Procéder à un bilan carbone des projets numériques, pour inclure cette donnée dans l'analyse.
  • Améliorer la prise en compte des aspects systémiques du numérique dans les secteurs clés que sont l’énergie, les transports, l’habitat et l'agriculture-alimentation.
  • Mettre en place ces mesures à l’échelle européenne et auprès d’organisations internationales, compte tenu de l’envergure mondiale des acteurs principaux du numérique.

Ce scénario ne remet pas en cause la transition numérique actuelle, mais permet de ramener l’augmentation de consommation d’énergie du secteur à 1,5 %. À lui seul, il ne permettra pas de réduire l’empreinte énergétique du numérique, mais simplement « d’éviter l’explosion » préviennent ses auteurs. D’autres efforts devront donc être entrepris à tous les niveaux.

La prise en compte de l’environnement, une des facettes de l’éthique du numérique

UNE ANALYSE GLOBALE

Discipline en pleine émergence, l’éthique du numérique vise à replacer les enjeux humains au cœur de la transformation digitale. Afin d’accélérer la prise de conscience au sein des grandes organisations, le Cigref a choisi d’intégrer la notion d’impact environnemental et sociétal dans son référentiel d’éthique numérique. Réalisé en collaboration avec le Syntec Numérique, ce référentiel publié fin 2018 préconise les actions suivantes :

  • Identifier un responsable et définir un plan d’action incluant la sensibilisation de tous les collaborateurs DSI et utilisateurs, appuyé sur des référentiels reconnus
  • Prendre en compte l’impact environnemental lors de toute passation de marché ayant une conséquence sur l’empreinte environnementale du SI
  • Conduire une évaluation régulière de l’empreinte environnementale du SI (au maximum tous les deux ans), en s’appuyant sur des indicateurs reconnus et auditables (Green IT ou WWF France)
  • Réaliser une étude d’impact sociétal des projets
  • Faire appel à des entreprises de l’Économie Sociale et Solidaire et de l’Économie Adaptée

Mentionnons enfin la création du label “numérique responsable” (NR) lancé en juin 2019 par l’Institut Numérique Responsable, avec le soutien du Ministère de la Transition Écologique et solidaire, de SGS et de la FING.

Le Green IT, souvent décrié pour n’être qu’un buzzword de plus, va-t-il enfin se concrétiser ?

Source : Cigref, The Shift Project