Une analyse en six axes :
1 - Une approche holistique
Le Zero Trust constitue avant tout une approche globale. Il ne s’agit pas d’un produit à installer, mais d’une véritable architecture de sécurité qui combine la technologie, l’organisation et l’humain. Concrètement, il repose sur l’authentification multifacteur, le chiffrement généralisé et la segmentation des réseaux pour limiter les déplacements latéraux d’éventuels attaquants. Il s’appuie aussi sur une cartographie des ressources critiques et un contrôle rigoureux des accès, ainsi que sur une culture de vigilance partagée par l’ensemble des collaborateurs. Chaque utilisateur, chaque appareil et chaque flux doit prouver son identité et sa légitimité, quel que soit l’endroit d’où il se connecte. Ignorer ces précautions peut coûter très cher : une cyberattaque entraîne en moyenne entre 300 000 et 500 000 euros de pertes pour une PME française, un montant insoutenable pour la majorité d’entre elles.2 - Les nouvelles règles du jeu : NIS2 et DORA
La réglementation européenne renforce cette exigence. La directive NIS2, transposée en droit français en janvier 2025, impose à de nombreux secteurs essentiels santé, énergie, transport, numérique d’identifier et de protéger leurs systèmes critiques, de détecter rapidement les attaques et de réagir efficacement. Les sanctions prévues peuvent atteindre jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires mondial. Pour le secteur financier, le règlement DORA fixe un cadre encore plus strict avec des tests de résistance réguliers, une surveillance continue des risques et des plans d’urgence obligatoires, allant jusqu’à engager la responsabilité personnelle des dirigeants. Et les PME ne sont pas épargnées : 47 % des entreprises ont déjà subi une interruption via un fournisseur piraté, preuve que la chaîne de sous-traitance reste une cible privilégiée des attaquants.3 - Un enjeu avant tout humain
Au-delà des outils, le Zero Trust représente un enjeu profondément humain et organisationnel. Il implique une transformation culturelle où les collaborateurs doivent être sensibilisés à la gestion de leurs identifiants, aux tentatives de phishing et aux réflexes de cybersécurité. L’expérience utilisateur doit rester fluide, car un dispositif trop contraignant est rapidement contourné. Près de 46 % des cyberattaques exploitent encore des erreurs humaines : un chiffre qui rappelle l’importance cruciale de la formation. Les conséquences dépassent d’ailleurs la sphère financière : une attaque peut fragiliser des négociations stratégiques, entacher durablement la réputation d’une organisation et mettre sous pression les équipes chargées de gérer la crise. Dans certains hôpitaux frappés par des ransomwares, des professionnels ont travaillé jour et nuit pendant des semaines, jusqu’à provoquer des démissions liées à l’épuisement.4 - L’intelligence artificielle, alliée et menace
L’intelligence artificielle vient ajouter une nouvelle dimension. Elle est à la fois une alliée et une menace. Côté défense, elle permet de détecter automatiquement les anomalies et de bloquer plus de 80 % des attaques sans intervention humaine. Mais elle est aussi utilisée par les cybercriminels pour générer des deepfakes, concevoir des campagnes de phishing hyper-ciblées ou encore exploiter des failles de manière accélérée. Selon les projections, le marché mondial de l’IA appliquée à la cybersécurité devrait atteindre entre 30 et 44 milliards de dollars en 2025, signe que cette technologie sera à la fois un bouclier et une arme redoutable.5 - Un voyage continu
Adopter le Zero Trust n’est pas une destination, mais un voyage continu. C’est une démarche progressive qui consiste à identifier ses trésors données clients, finances, propriété intellectuelle, à protéger ses portes par des mots de passe robustes et une authentification renforcée, à surveiller en permanence les couloirs numériques grâce à la détection des anomalies, et à former ses équipes pour qu’elles deviennent la première ligne de défense. Comme on le dit souvent, « la sécurité n’est pas un projet, c’est un état d’esprit ».6 - Des exemples concrets et des bénéfices clairs
Les exemples concrets parlent d’eux-mêmes. Une employée en télétravail ne dispose plus d’un accès illimité : même si son ordinateur est compromis, les attaquants ne peuvent pénétrer que dans une zone restreinte. Un fournisseur piraté n’a pas la possibilité de se déplacer librement dans les systèmes, car ses droits d’accès sont limités. Quant à un employé mécontent, ses accès disparaissent automatiquement dès son départ, ce qui empêche toute fuite de données.Les bénéfices du Zero Trust sont multiples. Pour les dirigeants, il garantit la continuité d’activité, la conformité réglementaire et la préservation de la réputation. Pour les collaborateurs, il offre un accès simple et sécurisé qui facilite le travail à distance. Et pour les clients, il assure la protection des données et renforce la confiance.
Dans un monde où les menaces évoluent chaque jour, le Zero Trust n’est plus une option mais une nécessité stratégique. De la même manière que l’on ferme la porte de sa maison et que l’on place ses biens les plus précieux dans un coffre, les données d’entreprise doivent être protégées avec la même rigueur. Le Zero Trust, c’est finalement adapter la cybersécurité au XXIe siècle pour protéger les organisations, leurs collaborateurs et la confiance numérique de notre société.
Par Sébastien GIAI-CHECA, Responsable Architectes Région Sud chez SCC