En lançant Advisory Services, Sophos convertit son intelligence sur les menaces en prestations de conseil structurées. Tests d’intrusion, audits applicatifs, validation des remédiations : l’éditeur complète sa couverture défensive et confirme une trajectoire amorcée depuis l’intégration de Secureworks. Un mouvement révélateur du basculement des éditeurs vers une offre de service à part entière — jusqu’au cœur de la relation client.

Dans l’univers de la cybersécurité, la sophistication des attaques n’est plus un argument marketing, c’est une réalité opérationnelle. Les rançongiciels exploitent des failles connues, les assaillants évitent les seuils de détection classiques, et les périmètres s’effacent sous la pression de l’hybridation. Pour les éditeurs, la réponse passe de plus en plus par une intégration verticale de la chaîne de valeur, qui dépasse les solutions logicielles. C’est dans cette logique que s’inscrit le lancement par Sophos de Advisory Services, une offre de conseil en sécurité offensive, directement adossée à son centre d’intelligence X-Ops.

Avec cette annonce, Sophos propose une approche plus systémique de la résilience : en amont, une détection préventive des vulnérabilités — contextualisée par rapport aux menaces réelles, et suivie d’une vérification formelle des correctifs ; en aval, une capacité d’intervention rapide, 24 h/24, en cas de compromission. Ce schéma à double boucle redéfinit le rôle de l’éditeur : il devient partenaire de résilience, au même titre qu’un MSSP, qu’un cabinet d’audit ou qu’une structure CERT.

L’offre s’articule autour de quatre piliers techniques : les tests d’intrusion externes et internes, l’évaluation de la sécurité Wi-Fi, et les audits applicatifs. Mais sa valeur repose ailleurs : sur l’intégration des signaux faibles fournis par Sophos X‑Ops, sur la capacité à contextualiser chaque test selon les menaces observées sur des réseaux similaires, et sur la promesse d’une « remédiation validée » — un retour opérationnel rarement proposé par les cabinets classiques.

Les équipes Secureworks comme colonne vertébrale de l’offre

Cette montée en gamme des services s’explique aussi par l’intégration progressive des équipes de Secureworks, ex-filiale de Dell spécialisée en réponse aux incidents. Recrutées par Sophos ces derniers mois, elles apportent une expertise pluridisciplinaire — réseau, IoT, applications critiques — et une culture de l’intervention héritée du terrain. Cette ressource humaine experte permet à l’éditeur de proposer des prestations plus crédibles, et surtout de les industrialiser sans dilution de qualité.

À titre d’exemple, le service Emergency Incident Response permet aujourd’hui un onboarding client en quelques heures, un triage initial sous 48 heures, et une prise en charge immédiate par un analyste dédié. Il inclut jusqu’à 45 jours de suivi post-incident et une analyse complète des vecteurs de compromission. Le tout selon un modèle de tarification clair, à coût initial fixe — un critère différenciant dans un marché souvent opaque.

Sur le terrain des cabinets de conseil, vers une recomposition silencieuse

Ce mouvement stratégique n’est pas isolé. Microsoft, Palo Alto, Trend Micro ou IBM ont renforcé leur maillage de conseil en cybersécurité, souvent par acquisitions ciblées. À mesure que les exigences réglementaires s’alourdissent (DORA, NIS 2, cyberassurance, audits de conformité), la demande en expertise intégrée explose — et les éditeurs y voient une opportunité de consolider leur relation client, tout en élargissant leur part de marché.

Mais cette hybridation croissante entre éditeurs de solutions, intégrateurs, cabinets d’audit et fournisseurs de services gérés (MSSP) soulève une question stratégique : jusqu’à quel point un acteur peut-il cumuler les rôles sans créer d’ambiguïté ? Lorsqu’un éditeur propose à la fois la solution de sécurité et l’audit de son efficacité, cela peut poser un problème d’indépendance, notamment pour les RSSI qui ont besoin d’un regard critique sur leur posture. De leur côté, les intégrateurs peuvent percevoir cette expansion comme une concurrence directe sur des prestations à forte valeur ajoutée. Dans les deux cas, la crédibilité d’un acteur dépend non seulement de son expertise technique, mais aussi de sa capacité à agir de manière ouverte, sans chercher à verrouiller les choix technologiques de ses clients.

La cyber pilotée par les signaux : une forme de conseil algorithmique

L’un des points différenciants de l’approche Sophos réside dans l’exploitation croisée des flux de menaces. Grâce à l’unité X-Ops, qui centralise les données issues de l’ensemble du parc client, de la réponse aux incidents, et de la recherche active, les prestations de conseil sont pilotées en continu. Le périmètre d’audit n’est plus seulement défini par les bonnes pratiques, mais par les attaques observées sur des contextes similaires, une forme de contextualisation algorithmique des diagnostics.

Ce modèle ouvre la voie à un nouveau type de conseil cyber : plus itératif, plus dynamique, et potentiellement plus adapté à la volatilité actuelle des menaces. Il préfigure également un changement culturel : le passage d’un conseil ponctuel, commandé, à une assistance permanente, pilotée par les flux et adossée aux solutions de sécurité déployées. Un paradigme qui interpelle les métiers, les directions IT, mais aussi les fonctions risques et conformité.

Car cette nouvelle forme de conseil intégré, piloté par les signaux et adossé aux solutions de l’éditeur, redistribue silencieusement les responsabilités. Les directions métiers doivent s’adapter à des recommandations dynamiques qui influent sur les processus opérationnels ; les DSI voient leur rôle d’arbitre technologique remis en question par une logique d’automatisation sécuritaire ; les responsables conformité, enfin, s’interrogent sur l’indépendance et l’auditabilité d’un pilotage devenu algorithmique. Autant d’enjeux qui appellent à une gouvernance renforcée, fondée sur la transparence et la traçabilité des décisions de sécurité.

Résilience proactive : vers une nouvelle gouvernance des systèmes critiques

La proposition de Sophos ne se limite donc pas à un élargissement de portefeuille. Elle traduit une ambition plus large : repositionner l’éditeur comme un acteur de gouvernance, capable d’intervenir à tous les niveaux du cycle de vie sécuritaire, de l’identification à la remédiation, en passant par la priorisation des actions. Une logique qui séduit les PME et les ETI, souvent dépourvues de cellules internes d’analyse ou de SOC dédiés.

Mais elle s’adresse aussi aux grands comptes, en tension entre l’exigence de conformité, l’optimisation des ressources cyber, et la surcharge opérationnelle des équipes. À travers Advisory Services, Sophos propose une réponse industrialisée à ces contraintes : une évaluation contextualisée, une remédiation validée, une intervention rapide en cas de crise. Et, surtout, une lecture croisée des signaux, pour faire de la cybersécurité non plus une couche technique, mais un levier de continuité stratégique.