RTE (Réseau de Transport d'Electricité) a lancé une alerte : nos capacités de production d'électricité pourraient devenir insuffisantes à partir de l'hiver 2015/2016.
L'horizon s'obscurcie pour l'électricité française. Entre l'application des politiques environnementales, l'évolution de la climatologie avec des pics de froid, l'arrêt de certaines centrales nucléaires, et les crises en Europe de l'Est, notre capacité de production d'électricité ne devrait plus suffire à couvrir nos besoins en hiver en cas de froid décennal, et cela dès l'année prochaine.
RTE lance une alerte
Cet avertissement est lancé par RTE (Réseau de Transport d'Electricité), qui souligne un paradoxe : selon Hervé Mignon, en charge des études à RTE, « nous sommes globalement en situation de surcapacité, mais nous avons en même temps une situation de manque de puissance pour les pics de consommation ».
Les causes sont multiples :
- la mise à l'arrêt de centrales à charbon, gaz et fioul, d'une part pour répondre aux nouvelles normes environnementales, également pour favoriser le développement des énergies renouvelables ;
- l'arrêt de deux réacteur nucléaires à la centrale de Fessenheim, programmé en 2016 mais dont la vie pourrait être prolongée afin de répondre aux pics éventuels ;
- l'arrêt de la production par les coups de freins sur le nucléaire et la fermeture de centrales fossiles chez nos voisins belges, britanniques et allemands.
Dans le même temps, la consommation d'électricité s'affiche en croissance, de 1,9 % jusqu'en 2019, avec une baisse légère (0,1%) chez les entreprises, mais une augmentation sensible (9%) chez les particuliers. Notre consommation devrait atteindre 488 térawattheures, soit une progression supérieure à celle du PIB. Ce qui se traduit par le fait que nous consommons toujours plus d'électricité dans un environnement économique qui pousse à ne pas couvrir voire à réduire notre capacité de production.
Quel impact sur les entreprises ?
En théorie, l'impact sur les entreprises devrait être limité. Les coupures de courant ne devraient concerner que les particuliers. RTE évoque un trou de production de 2.000 mégawatts dès l'hiver 2016, qui devrait toucher au plus 2 millions de consommateurs durant 3 heures.
Les coupures pourraient principalement intervenir lors des bascules entre entreprises et particuliers, les employés des premières quittant leur lieu de travail pour rejoindre leur domicile. C'est oublier cependant que si les coupures peuvent être dirigées sur des zones non industrielles et commerciales, le tissus des entreprises françaises est si diffus que certaines d'entre elles seront inévitablement touchées.
Les datacenters sont évidemment au cœur des inquiétudes. Mais ils ne seront pas touchés. D'une part, ils bénéficient de lignes spécialisées fournies par l'opérateur historique, qui d'ailleurs sont une des bases d'implantation d'un centre de données, comme la fibre pour communiquer. D'autre part, les équipements de sureté (onduleur, réserves de carburant, etc.) sont là pour prendre le relai sur des distances sensibles, plusieurs heures, avec intervention garantie des fournisseurs de fioul en cas de prolongation. La question devra cependant être posée aux datacenters de proximité, moins sensibles en matière de qualité de service.
La prudence du DSI
C'est donc vers le DSI ou le responsable informatique que nos regards se tournent. Certes, la menace n'est pas grande pour les entreprises, mais toutes ne sont pas à l'abri. La prudence s'impose, vous ne direz pas que l'on ne vous a pas avertis...
La part de l'effet des lobbys
La situation que nous venons d'évoquer pourrait continuer de se dégrader. A échéance 2030 et avec des besoins toujours plus importants, Henri Proglio, le PDG d'EDF, affirme que le parc nucléaire ne couvrira plus que 50 % de notre consommation. Actuellement le nucléaire couvre 75 % de nos besoins. Mais s'il ne couvrira plus que 50 %, ce sera en grande partie lié à un choix politique et sociétal, les énergies renouvelable devant monter en puissance, et couvrir à minima 32 % de la production à échéance décennale.
Les lobbys pétroliers, gaziers et nucléaires s'activent actuellement pour que nous maintenions nos outils de production sur les énergies fossiles. La guerre est ouverte, et nul doute qu'elle aura une influence sur la qualité de la production, du stockage, du transport et de la distribution l'énergie...