Carl Icahn a rompu avec ses habitudes pour investir 100 millions de dollars dans la start-up Lyft. Une goutte d'eau pour l'investisseur, mais un message fort pour le financement des start-ups américaines qui modifient leur cycle de vie pré-IPO.

L'homme d'affaires et milliardaire Carl Icahn est connu pour ses investissements stratégiques dans des entreprises publiques (cotées en Bourse), prenant une part réduite mais significative dans des grandes sociétés dont il souhaite infléchir la politique afin de faire fructifier son investissement.

Ce fut le cas dans Dell, où il s'est invité au capital pour tenter d'empêcher Michael Dell de rendre sa société privée, avec dans l'idée de découper l'entreprise afin d'augmenter sa surface boursière et de réaliser une plus-value confortable. Il est également entré chez eBay afin de pousser la séparation entre eBay et Paypal, au même motif. Ou encore chez Apple, attiré par le trésor de guerre du fabricant à l'abri des paradis fiscaux, et alléché par d'éventuelles redistributions.

Une goutte d'eau dans l'univers Icahn

Et voici que Carl Icahn vient d'investir 100 millions de dollars dans Lyft, contre 4 % de parts dans la jeune société. La start-up est un site original de 'partage de promenade', plutôt proche d'un Uber, et dont l'offre oscille entre le taxi/navette alternatif et le co-voiturage. Ce qui au passage a permis de pousser la valorisation de la start-up à 2,5 milliards de dollars.

100 millions de dollars, c'est une goutte d'eau dans l'océan financier de la holding Incahn Enterprises, qui pour le seul premier trimestre 2015 a réalisé un chiffre d'affaires de 4,5 milliards de dollars !

Alors, au-delà de l'intérêt personnel que Carl Icahn peut porter à cette start-up et ses fondateurs, pourquoi avoir rompu avec les règles qu'il a lui même énoncées, et se tourner vers une jeune pouce ? Les analystes voient deux raisons à cet engouement :

  • Icahn connecté suit la tendance

La première est que Lyft a déjà séduit des investisseurs prestigieux - Rakuten, Andreessen Horowitz, Founders Fund et K9 Ventures – auprès desquels elle a déjà levé 1 milliard de dollars. Or, Icahn est considéré comme l'un des investisseurs les plus connectés de la planète, des capitaux-risqueurs aux banques d'investissements et fonds de private equity. Il a donc du obtenir des garanties de ces derniers qui prendront son relai lorsque l'inévitable IPO de Lyft aura lieu.

Selon le Wall Street Journal, au rythme où vont les valorisations boursières à Wall Street, la bourse américaine, Lyft pourrait être valorisée 25 milliards de dollars… Une hypothèse qualifié de 'raisonnable'. Soit pour un risque limité à 100 millions de dollars, une plus value potentielle de 900 millions de dollars pout Icahn Enterprises.

  • Changement de rythme chez les start-ups

La seconde part du constat d'un changement dans le rythme de vie des start-ups américaines, avec l'allongement de la dernière étape, pré-IPO. Jusqu'à présent, les jeunes pousses tentaient d'aller assez rapidement à l'IPO afin de lever des fonds. Aujourd'hui, elles sont plutôt sollicitées par les fonds privés dont les investissements participent à augmenter sensiblement la valorisation, ce qui laisse aux investisseurs la possibilité d'une sortie avec une belle plus-value, certes probablement moins élevée que dans le cadre d'une IPO, mais moins risquées, et surtout nous soumise à la réglementation américaine des marchés publics.

Carl Icahn pourrait donc réaliser avec Lyft un 'petit' pari au risque limité, mais au potentiel important. A bientôt 80 ans, le vieux loup de la finance n'a rien perdu de ses qualités d'observateur opportuniste… Comme dans les années 80 où il a bâti sa fortune en partie grâce à des junk bonds ! Ces pacements à haut risque qui vont plomber la planète deux décennies plus tard.