C’est tout un pan de la culture universitaire américaine qui tremble, la plus ancienne université américaine envisage de supprimer dès 2022 les ‘clubs sociaux’, les fraternités, sororités et autres ‘clubs finaux’ d’étudiants plus ou moins élitistes qui trainent une réputation sulfureuse…

Un coup de tonnerre vient de retentir dans le monde universitaire américain : un comité du corps enseignant de la vénérable université de Havard, la plus ancienne université américaine, a publié un rapport de 22 pages recommandant que l'université interdise aux étudiants qui entrent dans la ‘classe’ de 2022 et au-delà de se joindre aux « fraternités, sororités et organisations similaires ».

Il est difficile d’évoquer le modèle universitaire américains - et ses dérives ! - sans parler de ces clubs d’étudiants, confréries, fraternités, sororités, 'final club', parfois appelés sous le terme générique de ‘clubs sociaux’. Ils font partie de la culture universitaire américaine, peuvent pour certains être assimilés à du folklore, et sont surtout régulièrement critiqués pour leurs dérives.

Pour celles et ceux qui ne les connaissent pas, je vous invite à regarder le désopilant « American College », qui a lancé le genre car le cinéma américain s’est depuis longtemps emparé de ce sujet, et en a fait un sous-genre à part entière de la rubrique comédies. Plus récemment, « The Social Network », l’histoire des origines de Facebook, a également évoqué les ‘final clubs’.

Mais au fait, quels sont les arguments du comité du corps enseignant de Harvard ? Ils sont particulièrement lourds : élitisme de race, sexisme, abus d’alcool, et autres problèmes dont certains, comme évoqué, tiennent à la nature même de ces clubs. Dont le stéréotype est unisexe, blanc et riche… Il faut reconnaître également que ces clubs sont à l’origine de nombreux scandales, les cas les plus graves impliquant des décès d’étudiants !

D’autres universités américaines ont déjà pris des mesures pour lutter contre ces dérives, la principale étant d’interdire aux étudiants de premier cycle de rejoindre les clubs sociaux. Mais ces universités n’ont pas l’aura de Harvard.

Dans le cas de cette dernière, la proposition entre également dans le cadre une révolution culturelle engagée depuis plusieurs années, avec par exemple la révision des titres du corps professoral, de multiples initiatives de diversité, des peines sévères condamnant les langages offensants, jusqu’à la modification de sa chanson officielle. Toutes ces mesures visent une plus large intégration et l'amélioration de la vie des étudiant, en éliminant une partie de la toxicité de sa culture sociale.

La proposition du comité du corps enseignant de l’université de Harvard sera-t-elle retenue ? L’université s’est engagée sur la voie d’un grand nettoyage culturel, c’est donc possible. Mais ses opposant auront deux arguments particulièrement forts. Un grand nombre de groupes sociaux de Harvard ont été depuis des siècles une facette de l'histoire politique américaine, et leurs membres ont une grande influence. Mais surtout, les anciens élèves membres des fraternités sont pour certains de riches donateurs, continueront-t-ils de mettre la main à la poche si l’on supprime leurs clubs chéris ?

Si elle poursuit le projet, l’université de Harvard va se retrouver devant un dilemmes : assurer la préservation de l’histoire et en assumer les dérives, ou réformer et en calculer le coût…

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